« Meursault, contre-enquête » de Kamel Daoud

Septembre 2016  –  Contreligne est heureuse d’annoncer que Mme Alice Kaplan vient de publier chez Gallimard son ouvrage paru quasi simultanément aux États-Unis au sujet de L’Étranger de Camus,  En quête de « L’Étranger» (trad. de l’anglais (États-Unis) par Patrick Hersant, Hors série Connaissance, Gallimard), ouvrage que les critiques du Monde et du New York Times ont jugé remarquable.     Ndlr


Cinquante ans après l’indépendance, voilà qu’un écrivain algérien s’empare de la langue française pour affronter l’autorité du régime actuel et pour faire face à sa langue de bois.  Le français n’est plus, comme au temps de Kateb Yacine, « un butin de guerre», car le pouvoir en Algérie ne parle plus cette langue. Il est devenu ce que Kamel Daoud appelle, dans Meursault, contre-enquête,  roman qui fera date dans la littérature algérienne, « un bien vacant » :  une maison de fantômes, pourtant solidement construite, où l’on peut rêver d’une autre vie1.

Né en 1970, Daoud a été scolarisé en langue arabe dans un pays qui classe le français parmi les langues étrangères.  Dans son école, m’explique t-il, c’était « une petite matière.»  Aujourd’hui, à l’école Mohamed Benzineb, autrefois  l’école communale où Camus a appris ses lettres, le français est obligatoire dès la troisième année du primaire.  Les élèves font une heure et demie d’étude, trois fois par semaine—ce qui n’est pas négligeable.  Mais toutes les écoles n’ont pas que de bons professeurs, et certains n’en ont aucun.

Daoud s’est mis à apprendre  le français «tout seul »  à partir de neuf ans, chez ses grands parents à Mostaganem.  On croit entendre Camus quand il explique que « très peu de gens autour de moi savaient lire. » En même temps, un père gendarme qui habitait loin lui envoyait de temps en temps des lettres en français, comme un défi.

Être né en 1970 en Algérie, c’est avoir passé les plus belles années de sa jeunesse en temps de guerre, dans la terreur.  On ne peut en sortir indemne.  Aujourd’hui, chroniqueur au Quotidien d’Oran, sous la rubrique « mon opinion, votre opinion, » Daoud est connu pour un style qui a fait penser à un « mélange entre Thomas Bernhard et Alexis de Tocqueville »,  colère lyrique tempérée de percutantes analyses de société.  Son atelier d’écriture était le journalisme avec les faits divers, au moment où il couvrait les procès pour Le Quotidien d’Oran dont il a été pendant huit ans rédacteur-en-chef.  La littérature en langue française a toujours été pour lui, dès l’enfance, la porte de sortie d’une société meurtrière, par où passaient la femme, le sexe, la poésie, la mythologie grecque—tout ce qui n’était ni récit national, ni Coran.  Auteur de nouvelles tout d’abord,  Daoud a publié Meursault, contre-enquête,  son premier roman, aux Editions Barzakh (Alger) en octobre 2013 ;  en mai 2014, Actes Sud (Arles) a publié le même texte à quelques détails près.  Le « Meursault » du titre, évidemment, c’est le Meursault de Camus, ce personnage connu de tous, qui ne laisse personne indifférent.  En prenant L’Etranger comme tremplin,  en s’emparant de son narrateur, Kamel Daoud a réussi un exploit à la fois critique et hautement littéraire.

« Aujourd’hui, M’ma est encore vivante »

Meursault, contre-enquête est un détournement,  dans la grande tradition post-coloniale d’ouvrages qui sont des « remakes » d’œuvres canoniques de la  littérature européenne.  On pense à La prisonnière des Sargasses de Jean Rhys. Dans ce roman de 1966, Rhys reprend l’histoire de Bertha Antoinette Mason, la folle au grenier, fantôme plus que personnage de Jayne Eyre, qui met le feu à la maison de Rochester. Rhys raconte son histoire depuis sa petite enfance dans les Antilles jusqu’à sa folie qui n’en est pas une.  Admettons que tout grand roman nous invite à ce genre de réécriture.  Comment lire Madame Bovary sans se demander quel fut le destin de la fille d’Emma ; comment tourner la dernière page  de Tendre est la nuit sans imaginer la fin de vie de Dick Diver ? Enfin comment lire L’Etranger sans vouloir connaître la vie de l’Arabe ?

Pour Daoud, le remake fait écho à ses premières expériences de lecture.  Enfant dans une maison où il y avait très peu de livres, son regard s’attardait toujours sur la page « du même auteur » et il s’essayait à imaginer les histoires qui correspondaient aux titres.   L’idée de réinventer L’Etranger lui est venu au cours d’une conversation avec un visiteur  à Oran qui voulait lui parler de Camus : il ne lui a pas posé une seule question sur l’Arabe.

« Les Arabes dans La Peste  et L’Etranger, » disait Edward Said dans un des essais fondateurs de la théorie post-coloniale, « sont des êtres sans nom qui servent d’arrière-fond à la grandiose métaphysique européenne qu’explore Camus. »2.  Kamel Daoud ne dit pas le contraire.  Mais là n’est pas son propos.  Pour lui, le fait que le personnage Meursault tire cinq fois sur un Arabe sans nom, qu’il y a vingt-cinq mentions d’Arabes dans le texte sans que l’Arabe assassiné compte dans l’acte d’accusation contre Meursault, le fait que l’ultime crime de Meursault, d’après ceux qui le jugent, sera de ne pas avoir pleuré à l’enterrement de sa mère, tout ceci produit avant tout un désir d’écrire.  L’Arabe portera désormais comme nom  Moussa, qui fait si joliment écho à Meursault.   Puisque Moussa est mort,  Daoud fait parler son frère, Haroun, qui aura le soin de raconter le jour où son frère est mort ainsi que sa destinée personnelle et celle de sa M’ma, les survivants du crime. Meursault, contre-enquête commence dans la colère de  Haroun contre Meursault.  Mais finit ailleurs.

Alger

« Tu y comprends quelque chose, toi l’universitaire ? »

Meursault, contre-enquête est un ouvrage qui fera certainement la joie des professeurs de lettres, tant s’y trouvent de clins d’œil aux textes de Camus.  Contrainte OuLiPienne:  Son roman a exactement le même nombre de signes que L’Etranger.   Il côtoie le texte de Camus par des citations, mises entre guillemets dans le texte,  et par des reprises d’éléments de l’original, tournés avec science et humour.  Quant à la forme du récit, elle s’inspire non pas de L’Etranger mais de ce que Daoud considère comme le  texte  « le plus sincère  et  le moins construit » de Camus, La Chute.  L’histoire se déroule dans un bar,  Le Titanic, devenu depuis l’indépendance  Djebel Zendel ( haut lieu des maquisards), où Haroun, nourri d’alcool, fabule.  Un bar—le genre d’endroit menacé d’extinction dans la pieuse Algérie d’aujourd’hui,  fait écho au bar   «Mexico-City»  à Amsterdam, où se déroule La Chute.   Clamance, dans La Chute, déclame devant un interlocuteur invisible.  Haroun livre sa tirade à  l’un des nombreux universitaires qui viennent en Algérie  pour étudier le grand auteur – les mêmes qui vont certainement éplucher le roman de Daoud.

On retrouve à travers la tirade de Haroun à-la-manière-de-La-Chute,  quantités de détails de L’Etranger adaptés à l’Algérie contemporaine :  Meursault s’ennuie le dimanche ;  Haroun le vendredi…. Salamano passe toute la journée à hurler contre son chien ;  le voisin de Haroun récite le Coran a tue-tête pendant la nuit ;  les Algériens de L’Etranger regardent les Européens en silence ;  dans Meursault, Contre-Enquête, ce sont des Roumi (Européens) qui reviennent en Algérie, qui errent en silence « essayant de retrouver qui une rue, qui une maison, qui un arbre avec un tronc gravé d’initiales. ».   Et  l’absurde camusien ? :  « L’absurde, c’est mon frère et moi qui le portons sur le dos ou dans le ventre de nos terres, pas l’autre. »  Quand je demande à Kamel Daoud ce que signifie l’absurde en Algérie aujourd’hui,  il me répond que « l’absurde est un devoir quand on a le Coran et un récit national qui pèsent trop lourd.   On part de l’absurde pour construire du sens ;  tandis que ceux qui partent du sens, ceux qui pensent détenir la vérité, finiront toujours dans l’absurde. »

Le procès de Haroun n’aura pas lieu

Meursault, contre-enquête  ne se contente pas de s’approprier L’Etranger pour s’en venger.  Le plus beau moment du récit  renverse brutalement la colère de Haroun contre Meursault,  et donne à Camus le rôle de procureur dans un procès imaginaire que fait Daoud, écrivain et chroniqueur politique, à son pays–à ce que l’Algérie indépendante a fait de sa liberté .

Reprenons son récit :  En 1962, au moment de la Libération, Haroun, l’homme dont « le frère est mort dans un livre »  a  27 ans.  Sa mère a trouvé du travail à Hadjout (ex Marengo, où Meursault enterre sa maman) comme femme de ménage ; mère et fils habitent une misérable dépendance d’une maison coloniale.  Au moment de la libération, le propriétaire fuit avec sa famille et Haroun et sa M’ma  prennent le bien vacant.  Et là, dans les premiers jours de l’indépendance, Haroun tue un colon, un certain Joseph Larquais  qui venait de se cacher dans les environs de cette maison coloniale abandonnée par les siens.   Œil pour œil.   Mais aussi acte qui bouleverse le narrateur,  devenu maintenant meurtrier à son tour.  Il n’est plus du côté de la victime.  Et c’est là où sa haine contre  Meursault, le meurtrier de son frère, se change forcément en identification ;  là aussi où la confrontation de Daoud avec Camus se transforme en admiration pour un deuxième frère,  un écrivain qui lui rend son reflet :  « j’y cherchais [dans L’Etranger] des traces de mon frère, j’y retrouvais mon reflet, me découvrant presque sosie du meurtrier. »

La scène de l’interrogatoire est sûrement le moment le plus drôle, le plus ludique, de Meursault, contre-enquête.  Haroun, tout comme Meursault,  est arrêté, et il doit faire face non pas à un procureur mais  à un Colonel de l’AFN, qui lui demande non pas s’il croit en Dieu mais s’il croit à la Révolution.    Meursault, dans L’Etranger, doit répondre du fait de ne pas avoir pleuré à l’enterrement de sa mère.  Haroun doit expliquer pourquoi qu’il n’a pas pris les armes pour libérer le pays.  L’absurde s’avère être une question de dates, et les dialogues qui s’ensuivent sont savoureux :

« Le Français, il fallait le tuer avec nous, pendant la guerre, pas cette semaine ! »

J’ai répondu que cela ne changeait pas grand-chose3. Interloqué sans doute, il se tut avant de rugir :  « Cela change tout ! » Il se mit à bégayer qu’il y avait une différence entre tuer et faire la guerre, qu’on n’était pas des assassins mais des libérateurs, que personne ne m’avait donné l’ordre de tuer ce Français et qu’il aurait fallu le faire avant.  “Avant quoi?”, ai-je demandé.  “Avant le 5 juillet!  Oui, avant, pas après, bon sang !”

Autrement dit,  si Haroun avait tué son roumi avant le 5 juillet 1962, il aurait commis un acte héroïque de guerre ;  après le 5, il s’agit d’un banal meurtre.

D’Alger à Arles

Daoud

Finalement, Haroun est libéré, sans procès.  Il assume son acte.  Jusqu’au jour où vient à la maison une jeune femme du nom de Meriem, à la recherche de sources du grand livre écrit par l’assassin de Moussa.  Son enquête l’a mené jusqu’à sa porte.   Il va l’aimer, elle va lui apprendre le français, et il va enfin lire le livre du meurtrier.  Dans l’édition algérienne de Meursault, contre-enquête, celle de 2013,  le livre qu’il lit s’appelle L’Etranger.  Dans l’édition française, celle de 2014,  il s’appelle L’Autre.  Dans l’édition algérienne, Daoud joue sur la petite dispute locale quant à l’adresse exacte de la maison de Madame Camus: « L’assassin habitait au 93, rue de Lyon, à Belcourt, mais je découvris, bien des années plus tard, qu’il n’avait, en quelque sorte, pas d’adresse:  en vérité, ses disciples ne savaient s’il s’agissait du 93, du 131 ou du 124 »4.  Tandis que l’édition française enlève le clin d’œil par une description imprécise de l’endroit,  et elle insiste davantage qu’il ne s’agit pas d’un vrai auteur : « L’assassin habitait quelque part dans un quartier non loin de la mer, mais je découvris, bien des années plus tard, qu’il n’avait, en quelque sorte, pas d’adresse.» Dernière modification:  Albert Meursault, l’auteur de L’Etranger dans l’édition algérienne, devient , dans l’édition française, simplement « Meursault.»  L’assassin de Moussa n’est plus l’auteur du livre, c’est le narrateur[5. « Le titre en était L’Etranger, le nom de l’assassin était écrit en lettres noires et strictes, en haut à droite :  Albert Meursault. » (Alger, 2013) ; « Le titre en était L’Autre, Le nom de l’assassin était écrit en lettres noires et strictes, en haut à droite :  Meursault. » (Arles, 2014)).

A quelques mots de près, qu’est-ce que cela change?  Partout dans ce roman, il y a une confusion vertigineuse entre narrateur et auteur, entre Meursault et Camus :  Haroun, délirant, ne voit pas la différence.  Et son délire se résume assez bien par ce nom comique,  Albert Meursault.   Comme si l’on disait  F. Scott Gatsby pour Gatsby le Magnifique,  ou  Jean-Paul Roquentin, pour La nausée. Enlever le prénom « Albert »  dans l’édition française adoucit  légèrement (mais pas fatalement) le geste de l’écrivain.  D’après la jurisprudence sur la propriété littéraire, Daoud a le droit de représenter Albert Camus en tant que personnage historique (droit de biographe), mais il n’a pas le droit de s’emparer d’une œuvre de création.  Le problème, et l’originalité de son propos, c’est que Daoud s’empare à la fois des éléments de la vie de l’auteur, et des éléments du texte, et il le fait au deuxième degré.   Nous rentrons alors dans le débat éternel, qui existe au moins depuis Proust et Sainte-Beuve :  en quoi un écrivain est-il une représentation de son personnage littéraire, et vice-versa ?  Conor Cruise O’Brien dans un essai polémique aux lendemains de l’indépendance de l’Algérie est allé jusqu’à dire que Camus effectuait « une solution finale artistique» contre les Arabes algériens,  raisonnement qui nous paraît aujourd’hui bien caricatural5.   En voulant représenter une société raciste dans un roman, on ne fait pas preuve de racisme.   Quant au geste de Daoud, il a joué, avec « Albert Meursault », sur le fait qu’en Algérie,  dans le discours autour de Camus,  texte et auteur sont fatalement confondus. Daoud a parfois l’impression qu’il existe un bien pensé algérien où «tuer un Arabe dans un roman, c’est  le même crime que de ne pas avoir soutenu le FLN. » Créer un auteur fictif qui s’appelle Albert Meursault, c’est à la fois exposer et ridiculiser cette confusion.

Nous avons demandé à Kamel Daoud comment il a vécu la réception de son livre en Algérie et en France. Chaque fois qu’il  a présenté son texte dans un librairie algérienne, m’a-t-il dit, il s’amusait à étiqueter dans la salle juges, procureurs, et avocats de la défense : « les Algériens font toujours un procès à Camus. »  Tandis qu’en France, après la publication par Actes Sud,  beaucoup de journalistes, de lecteurs,  voulaient  savoir  plutôt pourquoi il avait écrit un roman en partant de l’Etranger et, avec un brin de condescendance, ce qui lui donnait le droit de frôler l’œuvre du grand écrivain6.

Meursault, contre-enquête n’est pas un livre facile ; il faut le lire et le relire pour apprécier pleinement la césure du récit, entre les chapitres VIII et IX, le moment du meurtre qui, tout comme dans L’Etranger,  divise le récit en deux parties :  ce moment où Haroun entre dans la peau de Meursault, et où Daoud, qui jusqu’alors semblait simplement détourner L’Etranger, va bien au delà7.  Ce désir qu’il exprime de vouloir élargir l’histoire nationale est quelque chose qu’on entend de plus en plus dans ce pays qui sort de la décennie noire :

Mais viendra un jour où, pour continuer à vivre, ce pays cherchera la vie plus loin, plus haut, plus profond que sa guerre. On devra alors proclamer nôtres les anciennes histoires, toutes nos histoires et s’enrichir en nous appropriant Camus aussi, l’histoire de Rome, de la chrétienté de l’Espagne, des «Arabes» et des autres qui sont venus, ont vu ou sont restés. La langue française est un patrimoine, comme les architectures des colons, leurs traces et leurs actes, crimes ou marais asséchés, génocides et places publiques.

Finalement ce qu’il y a de plus émouvant dans Meursault, contre-enquête,  c’est cette langue que Daoud fait sienne – pas le français des colons, mais un français rêvé, celui de la littérature,  de la liberté, de la justice. Comme le dit son porte-parole Haroun,  “La langue française me fascinait comme une énigme au-delà de laquelle résidait la solution aux dissonances de mon monde.  Je voulais le traduire à M’ma, mon monde, et le rendre moins injuste en quelque sorte.”  Soulignons enfin qu’il s’agit dans son propos non pas de choisir telle ou telle langue, mais de réclamer les bénéfices de la traduction, de faire un va et vient entre le français et l’arabe[11. Finalement, c’est ni l’arabe classique, ni le français, mais  l’algérien,  (el-jazayriya), cette langue vivante qui « puise dans d’autres langues »  que Kamel Daoud voudrait voir élevée au statut de première langue du pays. Voir son manifeste de juin 2013 :   http://www.algerie-focus.com/blog/2013/06/djazairi-le-manifeste-de-ma-langue-par-kamel-daoud/.].  Ce n’est ni un néo-colonialisme, ni une nostalgie, car il faut comprendre que c’est seulement en tant qu’arabophone que Daoud peut faire son geste audacieux envers le français.

Au moment où la France lâche le français au profit de l’anglais,  d’autres s’en emparent.  C’est  un exemple à retenir.

Alice Kaplan – Oran, juin 2014

Lire aussi sur Camus dans Contreligne : Camus et le cinéma, Camus, d’Alger à New York, L’Etranger en bandes dessinées.  

Notes

Notes
1Notion qui reste à creuser et que l’on trouve déjà dans un éditorial d’Amin Zaoui en 2010 : http://www.djazairess.com/fr/liberte/135633.   Sur le détournement de l’habitus colonial en Algérie,  v. Henry Grabar, «  Reclaiming the City: Cultural Geographies: Changing urban meaning in Algiers after 1962,” in Cultural Geographies July 2014 21:389-409. Corbin Treacy aborde la question de la langue française dans l’Algérie contemporaine par le biais de son analyse du roman de Maissa Bey, Bleu, Blanc, Vert (Editions de l’Aube, 2006). Le récit de Bey démarre dans un bien vacant de 1962 et se termine en 1992 par la rénovation d’une maison coloniale  (Treacy, “Contested Cartographies: Maissa Bey’s Bleu, Blanc, Vert” in The Journal of North African Studies 18:3, 20013.)
2Edward Said, “Representing the Colonized:  Anthropology’s Interlocutors,” Critical Inquiry 15, Winter 1989, 205-225.
3Sans être une citation exacte de L’Etranger, cette phrase toute simple reprend à la perfection deux tics verbaux de Meursault, son “j’ai répondu que”  (“j’ai répondu que cela ne signifiait rien”; “j’ai répondu qu’on ne changeait jamais de vie”;  “j’ai répondu, ‘c’est que je n’ai jamais grand chose à dire”; “j’ai répondu que je ne croyais pas en Dieu”) et son “cela ne…” (“Cela ne signifiait rien,” Cela ne voulait rien dire,” etc.).
4Voir « Il habitait ou exactement ? » http://www.demarcalise.com.
5Conor Cruise O’Brien, Albert Camus of Europe and Africa  (New York:  Viking, 1970).
6Par exemple, dans ce compte-rendu très élogieux: “Il fallait un sacré culot pour se frotter à  L’Étranger  l’un des livres les plus lus au monde, inscrit sur la liste des cent meilleurs de tous les temps par le Cercle norvégien. »  http://lasemaine.dev.flare.actunet.com/2014/05/22/meursault-contre-enquete–kamel-daoud-editions-actes-sud.].   L’audace, pour les lecteurs français et algériens, n’est pas la même[8. Voir les analyses de Mary Anne Lewis de l’exportation de la culture maghrébine: “The Maghreb goes abroad: The “Worlding of Francophone North African Literature and Film in a Global Market” thèse de doctorat (Yale 2013) dont on trouve un résumé à http://pqdtopen.proquest.com/pqdtopen/doc/1495950079.html?FMT=ABS.
7Jennifer Carr, dans un travail de fin de semestre pour notre séminaire doctoral “Camus et la question algérienne,” (Yale, printemps 2014) conçoit le roman de Daoud comme l’inauguration d’un “post-post-colonialisme.”  Elle aborde Meursault, contre-enquête à la lumière du célèbre essai de Gayatri Spivak, “Can the Subaltern Speak?” in Cary Nelson et Lawrence Grossberg, eds., Marxism and the Interpretation of Culture (Urbana-Champagne:  University of Illinois Press, 1988).].  Attitude qui est confirmée dans l’une de ses plus belles chroniques, « Rapatrier un jour les cendres de Camus.»[10. https://www.facebook.com/kamel.daoud.7/posts/553935261355657.
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